À l’approche des fêtes de Noël, de nombreux consommateurs en France se préparent à dénicher de bonnes affaires dans le cadre d’une semaine de réductions exceptionnelles. Si le Black Friday est relativement récent dans l’Hexagone, il s’est fortement implanté ces dernières années, devenant l’un des événements commerciaux majeurs du pays. Toutefois, les bons plans ne parviennent pas entièrement à dissimuler les limites de ce système, tant sur le plan écologique que social. Voici tout ce qu’il faut savoir sur le Black Friday !
Le Black Friday est un événement commercial apparu initialement aux États-Unis, puis étendu mondialement. Il est organisé le vendredi qui suit Thanksgiving, soit le lendemain du quatrième jeudi du mois de novembre. Cette journée inaugure une semaine de promotions commerciales significatives dans divers secteurs, tels que le high-tech, la mode, l’électroménager et les loisirs. Selon Romain Gavache, Country Manager France chez le comparateur de prix leDénicheur, le Black Friday est l’événement annuel offrant les réductions les plus conséquentes : “la variation de prix la plus importante s’opère chaque année lors du Black Friday, surpassant même les périodes de soldes”.
Situé quelques semaines avant les fêtes de Noël, le Black Friday a bénéficié d’une médiatisation significative il y a quelques années, notamment en raison des foules massives et des scènes de violence qu’il a engendrées aux États-Unis. Toutefois, ces incidents sont désormais moins fréquents en raison de l’essor du e-commerce.
Le Black Friday trouve donc ses origines au pays de l’Oncle Sam, mais sa date de naissance exacte demeure imprécise. Si certaines sources situent le début du Black Friday dans les années 1930, durant la Grande Dépression, les premières utilisations du terme remontent aux années 1950. D’après le site américain de fact-checking Snopes, l’expression “Black Friday” désignait à l’origine le vendredi suivant Thanksgiving, journée pendant laquelle de nombreux travailleurs se déclaraient malades pour profiter de quatre jours de congés consécutifs. Ce n’est qu’en 1961 que le terme a été employé pour la première fois dans un contexte commercial. La police de Philadelphie utilisait alors les expressions “Black Thursday” et “Black Friday” pour désigner les deux jours de forte affluence de véhicules et de piétons dans les centres commerciaux après Thanksgiving.
Dès les années 1960 et 1970, profitant de la période propice aux achats de Noël, de nombreuses enseignes ont commencé à proposer des promotions et à adopter l’expression “Black Friday”, parfois nommée “Big Friday”. À la fin du siècle, le Black Friday était déjà une tradition bien établie dans toute l’Amérique du Nord. Au cours des années 2000 et 2010, la période de promotions s’est étendue : les enseignes ont proposé des réductions dès le jeudi, baptisé “Grey Thursday”, puis ont prolongé l’événement sur plusieurs jours, englobant le “Cyber Monday”. Bien que le Black Friday soit officiellement censé durer 24 heures, sa temporalité varie selon les enseignes, pouvant s’étendre jusqu’à 10 jours.
En France, le Black Friday n’est apparu que durant les années 2010. Contrairement aux États-Unis, où cette journée de rabais est largement adoptée par les enseignes physiques, en France, le Black Friday est avant tout un événement e-commerce. Sa mise en place est principalement le fait de géants du e-commerce, tant français qu’américains, comme la Fnac, Darty, La Redoute ou Amazon, désireux d’importer cette tradition américaine pour stimuler leurs ventes. Ce n’est que récemment que la tendance a commencé à se manifester dans les boutiques physiques françaises.
Le succès est indéniable : selon Foxintelligence, entreprise spécialisée dans les études de marché du e-commerce, l’édition 2022 du Black Friday en France a vu les ventes en ligne de jeux et jouets multipliées par 3,3, celles des produits high tech par 2,5 et celles du gros électroménager par 2,4. Une récente étude du Crédoc indique, par ailleurs, que 44 % des Français envisagent de participer à l’édition 2023 du Black Friday.
Si le Black Friday rencontre un succès massif, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer les dérives de l’événement. Des alternatives ont parallèlement émergé, afin de promouvoir une consommation plus responsable et éthique.
De nombreuses marques exploitent l’événement pour adopter des pratiques trompeuses, comme de fausses promotions. L’association UFC-Que Choisir indique : “Les marchands se sont donné une semaine pour vendre à tour de bras. Alors pour profiter de cette orgie de consommation, ils n’hésitent pas, comme les années précédentes, à multiplier les fausses promotions en surfant sur une législation peu contraignante.” Son Observatoire de la consommation épingle notamment Amazon, Conforama, Cdiscount, Rakuten et la Fnac pour leurs pratiques douteuses et parfois illégales.
Le Black Friday est également marqué par une recrudescence d’arnaques en ligne, exploitant l’urgence des promotions pour escroquer les internautes. Le site gouvernemental service-public.fr rappelle à l’approche de l’événement : “Outre les fausses promotions fréquemment relevées par les associations de défense des consommateurs, de nombreuses annonces frauduleuses destinées à vous escroquer ou à subtiliser vos données personnelles prolifèrent à l’occasion du Black Friday.”
Le Black Friday est également régulièrement pointé du doigt pour le modèle de consommation qu’il promeut. D’après Oxfam France, cet événement favorise une culture de surconsommation aux conséquences désastreuses pour l’environnement : la pollution liée à la production et au transport (exacerbée par les nombreux retours produits), matériaux non recyclés, destruction d’invendus, etc.
Paradoxalement, même si les Français semblent profiter des promotions du Black Friday, beaucoup sont conscients des limites de ce modèle. D’après l’étude du Crédoc mentionnée précédemment, 62 % des Français souhaiteraient une régulation plus stricte des incitations à la consommation, telles que la publicité ou les promotions. De son côté, le Gouvernement privilégie la responsabilité individuelle des consommateurs avec la diffusion, en collaboration avec l’Ademe, d’une campagne de sensibilisation à la sobriété destinée au grand public.
Aux conséquences environnementales s’ajoutent des problématiques sociales. En effet, Oxfam note également que le Black Friday met particulièrement sous pression les métiers les plus précaires, tant dans la création des biens (emplois en fin de chaîne de production) que dans la vente et la livraison (logisticiens, vendeurs, livreurs, etc.).
En opposition au Black Friday, de nombreux acteurs militent pour un Green Friday, qui prône une consommation plus réfléchie. Initialement, cette initiative vise à inciter les marques à vendre leurs produits au tarif habituel, tout en reversant les recettes du jour à des associations œuvrant pour la transition écologique. Mais l’expression a été régulièrement réemployée dans un sens plus large, y compris par Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.
De leur côté, certaines entreprises développent leur propre approche alternative. Ainsi, le site de mobilier durable et entreprise à mission Camif boycotte l’événement depuis plus de cinq ans. Sur son site, les réductions mises en avant ne concernent pas les prix, mais l’empreinte carbone des produits. Dans la tech, Back Market saisit également l’occasion du Black Friday pour mettre en valeur son modèle de produits reconditionnés, en soulignant un argument clé : les promotions sur leur site sont valables tout au long de l’année.
Le Black Friday est un événement commercial qui permet aux enseignes de gagner plus d’argent que les autres jours de l’année. Il s’agit donc d’un jour de surconsommation où de nombreuses marchandises vont être livrées à travers le monde entraînant ainsi une pollution massive, indique Back Market sur son site.
La loi française encadre les promotions intervenant dans le cadre de campagnes comme le Black Friday. Voici les règles que les enseignes doivent appliquer :
– Vente à perte : contrairement aux soldes, durant les périodes de promotion comme le Black Friday, les entreprises ne sont pas autorisées à vendre à perte. Elles ne peuvent pas non plus utiliser le terme “soldes” pour leur communication. Cependant, à l’inverse des soldes, il n’y a pas de limite de temps imposée pour ces opérations.
– Calcul des pourcentages de réduction : le pourcentage de réduction doit être calculé par rapport au prix le plus bas pratiqué sur le produit durant les 30 jours précédents. Certaines entreprises contournent cette règle en augmentant les prix un peu plus d’un mois avant le Black Friday.
– Affichage des prix de référence : le prix de référence des produits, c’est-à-dire le plus bas des 30 derniers jours, doit être clairement indiqué sous le prix réduit.
– Délai de rétractation : pour les commandes en ligne, les règles ne changent pas durant le Black Friday. Les consommateurs disposent d’un délai de rétractation de 14 jours après l’achat du produit, suite à quoi l’enseigne a également un délai de 14 jours pour effectuer le remboursement.